Euthanasie : pente glissante ou recours de plus en plus « éclairé » ?

La pratique de l’euthanasie évolue, mais le gouvernement entend garantir un cadre strict, éthique et accessible à tous, a précisé Frank Vandenbroucke interpellé notamment par la N-VA et le VB à la Chambre. Loin de l’image d’une “pente glissante”, les chiffres témoigneraient plutôt, selon le ministre, d’un recours plus éclairé et mieux encadré à ce droit fondamental. Mais est-ce vraiment sûr ?

Alors que les chiffres de l'euthanasie continuent d’augmenter en Belgique, le gouvernement insiste sur le bon respect de la législation actuelle. Le ministre de la Santé Frank Vandenbroucke rejette toute idée de dérive, souligne l’importance des garanties légales et annonce plusieurs mesures pour encadrer et moderniser la pratique, notamment à l’attention des personnes atteintes de démence. Les députés ne sont pas toujours du même avis.

3.991 euthanasies en 2024

En 2024, 3.991 cas d’euthanasie ont été enregistrés en Belgique, soit une hausse de 16,6 % par rapport à 2023, selon les chiffres récents de la Commission fédérale de contrôle et d’évaluation qui ont été rappelés en commission santé de la Chambre la semaine dernière. Cela représente 3,6 % de l’ensemble des décès contre 3,1% l’année précédente. Les autorités attribuent cette augmentation à des "évolutions démographiques" et à "une meilleure connaissance des droits en fin de vie", plutôt qu’à une pression sur les plus vulnérables. Loin de parler de dérive, il souligne que "chaque dossier est rigoureusement analysé, et aucun n’a été transmis à la justice".

La majorité des patients concernés ont plus de 70 ans – 43 % ont même plus de 80 ans – et sont souvent titulaires d’un diplôme de l’enseignement supérieur. Les cas d’euthanasie pour des patients de moins de 40 ans restent exceptionnels (1,3 %). La Commission insiste : pour les personnes dont la mort n’est pas imminente, un double avis médical et un délai d’un mois sont obligatoires.

Campagne d'information

Le ministre annonce vouloir intégrer la Commission à la Direction générale Soins de Santé afin de soulager la charge administrative croissante, et relancer le projet de numérisation des formulaires d’euthanasie, bloqué depuis 2023. Il promet aussi une refonte du site internet de la commission et envisage une vaste campagne de communication sur les soins de fin de vie. Objectif : mieux informer citoyens et professionnels, en s’inspirant notamment de la brochure LEIFplan, déjà diffusée à un million d’exemplaires.

En outre, depuis la loi du 15 mars 2020, les médecins réticents à pratiquer l’euthanasie doivent renvoyer le patient vers un confrère. "Cette obligation doit être respectée systématiquement dans tous les établissements", insiste Vandenbroucke, qui veut garantir un égal accès à l’euthanasie, quelle que soit l’origine du patient.

Démence et sédation

Le ministre prépare une extension de la déclaration anticipée d’euthanasie aux personnes atteintes de démence irréversible. Un cadre éthique et juridique est à l’étude, combinant protection du patient et soutien au personnel soignant. Par ailleurs, Vandenbroucke souhaite renforcer les soins palliatifs pour ces patients. Concernant la sédation palliative, peu documentée à ce jour, un groupe de travail planche sur un guide de bonnes pratiques.

Interpellé par la députée Dominiek Sneppe (Vlaams Belang), Vandenbroucke s’est montré favorable à une évaluation législative de la loi actuelle, bien que celle-ci ne relève pas de la Commission. Cette dernière se tient toutefois prête à fournir son expertise si le Parlement le demande.