Lettre à l’Inami dans le cadre de l’avant-projet loi-cadre proposé par le ministre fédéral de la santé
"Les réformes de Frank Vandenbroucke seront désastreuses pour les patients et les médecins"
La nouvelle loi-cadre proposée par notre ministre fédéral de la santé se trompe carrément de cible en se focalisant sur les médecins plutôt que sur les mutuelles. La plupart de ses propositions vont à l’encontre d’une médecine libérale et de qualité, telle que nous la connaissons actuellement.
Introduction
La Belgique peut se féliciter d’avoir l’une des meilleures médecines au monde. Nos soins de santé sont équitables, accessibles à tous, dans des délais plus que raisonnables, laissant le libre choix aux patients de leurs médecins et de leurs hôpitaux. Notre médecine est libérale, équitable, de qualité et pas plus onéreuse que dans nos pays voisins qui, pour la plupart, nous envient.
Les propositions actuelles, faites par notre ministre de la santé, ont comme cible préférentielle, le corps médical, cheville ouvrière de nos soins de santé. Le résultat de cette politique sera désastreux pour nos concitoyens avec une carence médicale qui ne cessera de s’accentuer au cours des années à venir. Pourquoi faire autant d’années d’études d’une telle difficulté, pourquoi se pourrir la jeunesse à travailler comme un acharné pendant 9 à 15 ans, pour in fine se retrouver « fonctionnaire d’état » ? Cela va engendrer une démotivation complète des médecins encore actifs et un désintéressement croissant des futurs médecins pour la profession.
C'est une politique basée sur un modèle « d’étatisme dogmatique », où à terme, tous les généralistes pratiqueraient en maisons médicales, et où les spécialistes deviendraient des salariés de l’état
Car c’est bien de cela dont il est question, une politique basée sur un modèle « d’étatisme dogmatique », où à terme, tous les généralistes pratiqueraient en maisons médicales, et où les spécialistes deviendraient des salariés de l’état, rémunérés selon des barèmes préétablis en fonction de leur spécialité.
Jamais, monsieur le ministre, les médecins belges n’accepteront d’être traités de la sorte. Vous vous focalisez sur les mauvaises cibles !
Propositions
1) Revoir en profondeur le mode de fonctionnement et le rôle des mutuelles
Asbl Initialement prévues pour être de simples intermédiaires administratifs entre l’INAMI et le patient, les mutuelles ont vu leur pouvoir décupler proportionnellement à leur enrichissement. Elles se sont auto-proclamées « assureurs » et avec leurs plantureux bénéfices, ont investi massivement dans l’immobilier, des chaines de pharmacie et certaines rachètent même des hôpitaux, en incitant leurs affiliés à s’y rendre pour y être mieux remboursés...
Ce qui est par contre, totalement malhonnête de leur part, est de vendre des assurances à leurs affiliés et leur dire le moment venu : « surtout ne l’utilisez pas » sinon l’hôpital vous comptera des suppléments. C’est un peu comme si vous réserviez une suite dans un hôtel et qu‘en arrivant on vous disait : « prenez plutôt la chambre standard ». Sauf que l’assurance, comme la chambre, vous l’avez payée et donc vous y avez droit ! Tout cela fait partie d’une incroyable manipulation, jouant sur la crédulité des gens et pointant du doigt le médecin cupide qui demande un supplément. Le parfait bouc émissaire...
Nous sommes clairement face à un conflit d’intérêt flagrant! Mutuelles secrétaires de l’INAMI/Mutuelles assureurs/Mutuelles propriétaires d’hôpitaux et de chaînes de pharmacies... Et cerise sur le gâteau, elles sont, en plus, exemptées d’impôts.
Nous sommes le seul pays à avoir des mutuelles politisées. Inutiles et très couteuses. Un seul et unique organisme national serait amplement suffisant. Une IA bien programmée ferait parfaitement leur boulot administratif et ne s’enrichirait pas sur le dos des citoyens et de l’État.
Pourquoi dans la nouvelle loi cadre, les mutuelles ne participeraient-elles pas au redressement de la dette sanitaire en reversant une partie, voire la totalité de leurs bénéfices indument perçus depuis des décennies ? Cette seule exigence suffirait à renflouer largement les dépenses de nos soins de santé...
2) Revoir les statuts « BIM » et celui des malades « longue durée »
Revoir la façon dont sont distribués, parfois à tort et à travers, certains statuts BIM : « sans salaire » ne signifiant pas « sans revenu ». Et la gratuité des soins en médecine est à proscrire, sauf cas extrêmes. Elle engendre inévitablement la surconsommation et creuse encore un peu plus le déficit. Combien de patients BIM ne prennent-ils pas rendez-vous chez plusieurs spécialistes en même temps, juste parce c’est gratuit ?
Quant aux malades de longues durée, il est grand temps qu’ils soient suivis de plus près et remis au travail dès que possible... La complaisance dans ce domaine est manifeste et néfaste pour le patient. Pour beaucoup, l’inactivité entretient la maladie. Il est tout de même étonnant de constater que depuis que les conditions du chômage se sont durcies, un certain nombre de personnes concernées sont subitement passées du statut « chômeur longue durée » à celui de « malade longue durée ».
3) Annuler la proposition de suppression des 10% du code INAMI destiné à rémunérer les assistants.
Dans un bloc opératoire, l’assistant est en quelque sorte le copilote du chirurgien. Plus de code, plus d’assistant !
Il est la 3ième et 4ième main du chirurgien et participe activement à l’intervention tout au long de son déroulement. Il effectue en quelque sorte « un double contrôle ». Un petit vaisseau mal coagulé, une compresse oubliée, une suture perméable… Un tas de petits détails qui peuvent passer inaperçus, où quatre yeux font clairement la différence…
Mais ce n’est pas la seule tâche de l’assistant. Il assiste également le patient avant et après son intervention. Il participe activement au bon déroulement de l’hospitalisation et est le premier relais avec le personnel infirmier.
"Supprimer les assistants reviendraient faire reposer tout l’acte chirurgical sur les épaules d’une seule personne…"
Un des principaux motifs invoqués à cette suppression par notre ministre est celui de la robotisation… La chirurgie connaît aujourd’hui une série d’aides robotisées permettant une plus grande précision de l’acte chirurgical. Mais en aucun cas, les robots ne pourrons remplacer les médecins en matière de contrôle et de sécurité. En tout cas pas à l’heure actuelle…
Supprimer les assistants reviendraient faire reposer tout l’acte chirurgical sur les épaules d’une seule personne… Nul n’est infaillible. La fatigue, la tension nerveuse, la complexité de l’intervention sont autant d’éléments qu’il faut prendre en considération pour une sécurité optimale du patient opéré. C’est là un rôle essentiel de l’assistant. Servir comme second rempart de protection…
4) Dissocier complètement le financement des hôpitaux des honoraires des médecins
Il est essentiel de revoir en profondeur, le financement des hôpitaux. Il faut qu’à l’avenir, il ne soit plus associé aux honoraires des médecins, ce qui depuis trop longtemps est mal compris des patients.
Pourquoi un chirurgien prendrait-il 200% ou 300% sur une chambre privée ? Cela peut paraitre choquant pour les patients, alors qu’en fait, il en reverse presque 50% à l’hôpital...
Initialement, c’est ce qui a permis à l’INAMI de prtaiquer des codes opératoires raisonnables, étant entendu que les assurances santé verseraient le complément d’honoraires aux médecins. Mais depuis que les mutuelles se sont auto-proclamées assureurs, elles voudraient supprimer purement et simplement ces soi-disant « suppléments d’honoraires », une façon de plus de s’enrichir en vendant des assurances à leurs affiliés qui ne serviront plus à rien !
Outre les subsides reçus de l’État, les hôpitaux devraient en partie calquer leur mode de fonctionnement sur le système de gestion des grandes chaînes hôtelières.
Conclusion
La nouvelle loi-cadre proposée par notre ministre fédéral de la santé se trompe carrément de cible en se focalisant sur les médecins plutôt que sur les mutuelles. La plupart de ses propositions vont à l’encontre d’une médecine libérale et de qualité, telle que nous la connaissons actuellement. Oui, aujourd’hui l’accès aux soins est équitable pour tous, quel que soit le niveau social des patients. Ils sont libres de prendre, ou non, des assurances complémentaires. Vouloir détricoter le système mis en place serait contre-productif et aboutirait à une démotivation complète du corps médical avec une carence annoncée et inquiétante de la profession dans les décennies à venir.