[Opinion] Irina De Knop (Open Vld) : « Le plan global de Vandenbroucke sur les malades de longue durée, c’est du vieux vin dans de nouvelles bouteilles »
La Belgique compte aujourd’hui près d’un million de personnes en maladie ou en invalidité. Plus de la moitié sont à l’arrêt depuis plus d’un an et pour un tiers, cette situation perdure jusqu’à la pension. Notre pays compte autant de malades de longue durée que l’Allemagne… qui compte pourtant huit fois plus d’habitants. On n’est plus face à un problème marginal, mais à un déraillement structurel majeur.

Pourtant, le ministre Vandenbroucke ne fait pas ce qu’il faut. Il s’accroche à une approche centrée sur les structures, les règles et un personnel administratif accru et mène, ironiquement, une politique antisociale. Il parle d’activation, mais passe à côté de l’essentiel : une évaluation indépendante et un accompagnement personnalisé, axé sur les résultats, pour les personnes en incapacité de longue durée. Et ce, alors que la volonté de reprendre le travail est souvent bien présente. Selon les chiffres d’Idewe, 80% des malades de longue durée souhaitent retravailler. Le fait que le ministre n’arrive pas à les atteindre montre l'échec de sa politique. Il empile les couches sur des fondations fragiles : davantage de coordinateurs, de formulaires, de concertations... sans réforme de fond. Le soi-disant « gamechanger » - une réévaluation après un an - arrive trop tard. À ce stade, bon nombre de personnes ont déjà perdu tout lien avec le travail. Une réintégration avant six mois est cruciale, or c’est précisément ce qui fait défaut dans le système actuel.
Trois mesures prioritaires
Il est temps de changer de cap. Trois mesures peuvent faire la différence à court terme :
1. Retirer le suivi des mains des mutuelles: elles sont à la fois arbitre, gestionnaire de dossier et coach de leurs membres qui cotisent. Ce que les chômeurs sont aux syndicats, les malades de longue durée le sont aux mutualités : un modèle économique qui alimente un conflit d’intérêts manifeste. En outre, un malade de longue durée peut changer de mutuelle s’il n’est pas satisfait de son “service” - ce qui rend tout suivi objectif illusoire.
Aujourd’hui, nous voyons des médecins-conseils qui, sous la pression du temps, se contentent de cocher des cases au lieu de détecter le potentiel de réinsertion professionnelle. Des personnes qui pourraient effectivement retravailler attendent trop longtemps. D’autres, qui ne reprendront jamais le travail, sont inutilement soumises à des réexamens. Résultat : tout le monde y perd, mais personne n’est tenu responsable. Confions l’évaluation de l’incapacité primaire et de l’invalidité à des médecins indépendants de l’Inami, sans lien avec les mutualités.
2. Miser sur un accompagnement personnalisé et sur mesure: les structures mises en place par Vandenbroucke ne fonctionnent pas. Les 90 coordinateurs « Retour au travail » au sein des mutualités n’obtiennent aucun résultat. Le fonds « Retour au travail » (...) dispose d’un budget de 9,5 millions d’euros, mais est à peine utilisé. La procédure est trop complexe, sans orientation systématique. Ce qu’il faut ? Une évaluation rapide du potentiel de travail et un accompagnement personnalisé vers un emploi adapté. Ceux qui refusent de collaborer doivent en subir les conséquences : pas d’effort, pas d’allocation.
3. La prévention n’est pas un luxe, mais une nécessité: mieux vaut prévenir que guérir. Plutôt que de pénaliser les employeurs par des surcoûts salariaux et un allongement du salaire garanti, encourageons-les à investir dans le bien-être au travail (...) et récompensons les bons résultats par une réduction des cotisations sociales. Réorientons la politique collective de bien-être vers une approche adaptée aux besoins individuels de chaque travailleur. (...)
Réintégrer ne fût-ce que 10% des malades de longue durée représenterait 50.000 personnes supplémentaires sur le marché du travail.
Grâce à une évaluation médicale indépendante et une intervention précoce, les dépenses diminuent et notre force de travail disponible augmente. Réintégrer ne fût-ce que 10% des malades de longue durée représenterait 50.000 personnes supplémentaires sur le marché du travail, soit près d’une offre d’emploi vacante sur quatre. Ne laissons pas les gens se perdre en procédures et dans les structures, accompagnons-les de façon personnalisée pour qu’ils puissent à nouveau mettre leurs talents au service de notre économie et de notre société: tel est le message.