« Les mutualités estiment que je cède trop aux revendications des médecins. »
La Chambre : Vandenbroucke clarifie les modifications à la loi-cadre
En commission, le ministre de la Santé publique Frank Vandenbroucke a été interrogé au sujet de son avant-projet de loi-cadre. Il a expliqué quelles modifications avaient été apportées et a confirmé que le projet sera soumis vendredi au Conseil des ministres.
Erik Derycke
La commission Santé de la Chambre a tenu aujourd’hui un débat d’actualité sur les négociations que mène Frank Vandenbroucke avec les syndicats médicaux. Des discussions qui n’ont guère abouti, si ce n’est à la première grève des médecins depuis un quart de siècle, tancent certains députés.
Irina De Knop (Open VLD) a souligné que les organisations médicales conservent des objections à l’égard de la deuxième version de l'avant-projet de loi, notamment en ce qui concerne les suppléments d’honoraires et le retrait des numéros Inami. Elle a reproché au ministre de « faire les choses dans le mauvais ordre » et de demander un chèque en blanc pour pouvoir ensuite décider unilatéralement par arrêté royal.

La présidente de la commission, Ludivine Dedonder (PS), a également voulu savoir si le dialogue avait permis de restaurer la confiance et quelle était la position des partenaires de la majorité face au projet.
Prévu par l’accord de gouvernement
Dans sa réponse, Frank Vandenbroucke a souligné l’importance d’une rémunération correcte pour tous les prestataires de soins, d’un financement adéquat des hôpitaux, mais aussi de la nécessité de garantir l’accessibilité financière pour les patients et la clarté des tarifs.
Il a renvoyé, pour ce qui est du calendrier de la loi-cadre, à l’accord de gouvernement, qui prévoit qu’un nouveau cadre pour les accords doit être établi d’ici la fin de l’année.
Bien que l’accord stipule que ce cadre entre en vigueur immédiatement, sa mise en œuvre est reportée à 2028, car la loi-cadre est liée à la réforme de la nomenclature et au financement des hôpitaux. Si ces réformes ne sont pas finalisées à temps, l’entrée en vigueur de la loi-cadre sera repoussée d’un an.
L’accord de gouvernement exige également un plan de contrôle plus strict.
L'avant-projet de loi examiné vendredi en Conseil des ministres
Frank Vandenbroucke a confirmé que la loi-cadre figure à l’ordre du jour du Conseil des ministres de ce vendredi. Il a toutefois refusé de dire si le texte serait déjà approuvé en première lecture, estimant que de nombreux autres dossiers sont également inscrits à l’agenda gouvernemental.
Le ministre a précisé qu’une première lecture n’est jamais définitive et que des ajustements peuvent encore être apportés lors de la deuxième lecture.
Il a également souligné que de nombreux malentendus subsistent autour du projet. L’idée selon laquelle il retirerait personnellement des numéros Inami à des médecins est, selon lui, « une absurdité totale ». Son objectif, a-t-il affirmé, est justement d’apporter une sécurité juridique, notamment en matière d’attribution des numéros Inami ou de gestion de la masse d’indexation, des domaines dans lesquels il n’existe actuellement aucune règle claire.
Plus tard dans le débat, Frank Vandenbroucke a tenu à clarifier que la formule « le Roi décide » dans une loi ne signifie pas qu’un ministre peut agir de manière unilatérale, mais qu’un arrêté royal est nécessaire pour instaurer une réglementation détaillée.
Modifications après concertation
Selon Frank Vandenbroucke, les concertations ont permis de clarifier de nombreux points, et le projet de loi a été modifié sur plusieurs aspects.
Ainsi, la convention partielle est maintenue, et le ministre se dit ouvert à une révision des modalités qui l’encadrent.
L’accord de gouvernement prévoit une incitation renforcée à la convention, mais à l’issue des discussions, il a été décidé que les primes liées à la qualité resteront accessibles à tous les prestataires de soins, qu’ils soient conventionnés ou non.
Les nouveaux textes précisent également la procédure de retrait d’un numéro Inami : celui-ci devra passer par une instance juridictionnelle présidée par un magistrat, avec des médecins comme représentants et une possibilité de recours.
Par ailleurs, la règle des trois quarts pour dénoncer un accord ne sera introduite dans aucun secteur où elle n’existe pas actuellement. En ce qui concerne le financement des syndicats médicaux, les modalités pratiques feront l’objet de discussions sectorielles.
Suppléments d'honoraires
La question des suppléments d’honoraires demeure le principal point de tension. Afin de clarifier le lien avec la réforme de la nomenclature, le texte de loi stipulera explicitement qu’aucune limitation des suppléments ne pourra entrer en vigueur avant le 1er janvier 2028.
S’agissant des plafonds, Frank Vandenbroucke maintient pour l’instant les seuils de 25 % et 125 % dans la version soumise à la première lecture, mais il avance une double proposition.
À court terme — d’ici la mi-septembre —, les professions concernées pourront apporter des données chiffrées et concrètes prouvant que les plafonds prévus sont irréalistes. Dans ce cas, des ajustements pourront être apportés lors de la deuxième lecture.
À plus long terme, la question des plafonds sera intégrée dans les discussions conventionnelles. Chaque commission d’accords pourra proposer une hausse des plafonds pour certains actes, disciplines ou sous-secteurs. Le gouvernement devra entériner cette décision.
« On dispose donc de temps, d’ici début 2028 (ou un an plus tard), pour examiner cela en détail dans le cadre des concertations. Ce n’est pas une modification mineure du projet initial », a déclaré Frank Vandenbroucke.
Indexation, garde et critiques persistantes
Frank Vandenbroucke a également rappelé que si aucun accord n’est conclu dans les délais, le ministre n’est pas tenu d’octroyer l’enveloppe d’indexation. La nouvelle version de la loi précise toutefois que, dans un tel cas, la masse d’indexation reste disponible jusqu’à la conclusion d’un accord. En dernier recours, si aucun accord ne peut être trouvé, le gouvernement pourra fixer lui-même les tarifs, mais devra malgré tout accorder cette enveloppe.
Le ministre a insisté sur le fait que l’indexmassa ne correspond pas à une indexation automatique et linéaire de tous les tarifs, mais constitue une enveloppe budgétaire utilisée dans le cadre des commissions d’accords pour définir des priorités politiques.
Enfin, Frank Vandenbroucke a annoncé que sa réforme comprend également une nouvelle réglementation des postes de garde et des services d’urgence.
En conclusion, il estime avoir répondu à de nombreuses critiques : « Les mutualités estiment que je cède trop aux revendications des médecins », a-t-il déclaré, « mais c’est ainsi que je présenterai le texte au gouvernement. »